L’impensé, l’inconscient, l’impossible à dire et à être, Comment la danse et la psychanalyse nous y mène.

Publié par MARC ANTOINE BOURDEU sur 5 Mars 2021, 10:32am

TAUBERBACH Alain PLATEL Compagnie CDELAB

VADER PEEPING TOM

Au début était FREUD et les femmes hystériques, en les écoutant, en écoutant les mouvements de leurs corps et les mots qu’elles pouvaient mettre dessus, la psychanalyse s’est inventée.

On a longtemps pensé que l’hystérie concernait uniquement les femmes mais on la repère également chez les hommes. LACAN nous a aidé à dépasser ce binarisme biologique et genré. Pour LACAN « L’hystérique n’est pas obligatoirement une femme, ni l’obsessionnel obligatoirement un homme » Séminaire d’Un Autre à l’autre. La cure psychanalytique ramène toute névrose à son noyau central qui est hystérique, ainsi nous pouvons dire que l’hystérie est, ce les humains ont en commun.

Les corps désarticulés des hystériques ont pu s’articuler à la parole et à la chaine signifiante grâce à la cure par la parole, « la talking cure » comme l’appelait l’une des premières patientes de FREUD, Anna.O ; C’est donc la parole qui relie les mots (les maux) et les dénoue en les renouant autrement.

Pour Françoise DOLTO, le bébé, le petit d’homme, né dans un bain de langage, un bain de signifiants, de paroles, de mots, de sons. Le corps est fait de parole et de chair, fait de mots, quoi de plus subjectif, donc, qu’un corps. Jacques LACAN parlera du corps dans ses trois dimensions : réel, symbolique et imaginaire.

Depuis toujours, les artistes représentent le corps sous ses différentes dimensions au travers du geste, de l’attitude, le corps vêtu et dévêtu, le corps masculin, le corps féminin, le corps des enfants, mais aussi ce qui ne peut se montrer, le manque à être ou à se dire. C’est présent dans toutes les branches de l’art : arts visuels, arts plastiques ou arts vivants, bien évidemment en danse.

Un chorégraphe comme Alain PLATEL, fondateur des Ballets CdelaB que nous avons reçu par deux fois à Espace Analytique aux Rencontres Danse et Psychanalyse axe son travail, sur la question de l’indicible, quand on ne peut plus arriver à dire avec les mots car les émotions sont trop fortes ou trop refoulées, alors peut être la danse peut venir aider à faire dire par le corps. Cela est très présent dans sa pièce « TAUBERBACH ». Lire le compte rendu sur ce blog.

C’est la compagnie de danse PEEPING TOM qui avec ses différentes pièces, dont les plus récentes, qu’il nous a été possible de voir, comme leur tryptique « MOEDER, VADER, KIND » tente de cerner par le corps et les mouvements désarticulés de leurs interprètes cette impossibilité à dire. Il y a un an, Franck CHARTIER de PEEPING TOM venait échanger à Espace Analytique pour Danse et Psychanalyse (1). Lire le compte rendu sur ce blog.

Tout comme la danse s’y essaye, La psychanalyse lacanienne tente de cerner et d’élaborer ce qui ne peut se dire. Elle appelle Réel, ce qui ne peut être symbolisé, c’est-à-dire ce qui ne peut être dit, car pour elle, il existe un trou dans le langage qui ne permet pas aux humains de pouvoir tout dire. Nous sommes tous aux prises avec ce manque structurel. Ainsi avec la règle de l’association libre, inventée par Freud, par laquelle l’analyste demande à l’analysant de dire toutes les pensées qui viennent équivaudrait à « Dites n’importe quoi, vous ne savez pas ce que vous dites, mais pourtant vous dites quelque chose “par les mots qui (vous) manquent” »Alain VANIER.

Ainsi la danse et la psychanalyse chacune à sa manière tentent de cerner ce réél.

Cette rencontre a débouché sur des échanges entre Franck CHARTIER et Marc Antoine BOURDEU, sur une approche psychanalytique de la figure féminine de Didon de Carthage. PEEPING TOM avait le projet de mettre en scène et chorégraphier en 2021 un « DIDON ET ENÉE » de Purcell en collaboration avec les Concerts d’Astrée d’Emmanuelle Haïm. Peut-être une prochaine rencontre Danse et Psychanalyse sur ce projet ?